En juillet 2018 paraissait le Rapport GAFI « Financial Flows from Human Trafficking ». https://www.fatf-gafi.org/media/fatf/content/images/Human-Trafficking-2018.pdf . Pour celles et ceux qui n’en auraient pas encore pris connaissance, je vous encourage à le parcourir. La Suisse y a participé au travers du Groupe Egmont. Ce rapport contient plus d’une quinzaine de pages d’exemples concrets ainsi qu’une liste d’indices de détection à considérer.

Saviez-vous qu’aujourd’hui on estime le nombre de victimes de ce trafic sordide à plus de 40 millions de vies ? Selon le Protocole de Palerme, le trafic d’êtres humains (HT) se subdivise en 3 catégories 1) HT pour travaux forcés 2) HT pour exploitation sexuelle 3) HT pour commerce d’organes.

Les premières victimes sont les femmes (71%) ensuite les enfants (28%). Ces activités en croissance exponentielle, vu le nombre de zones en conflit, génèrent plus de USD 150 Mrds de revenus par an, dont 100 pour la seule catégorie de l’exploitation sexuelle.

Que tentent de faire les criminels avec ces revenus ? Les blanchir. Où ? Dans le système financier. Notamment via le Private Banking, les entreprises de trading et les Centres offshore. Depuis quelques années on ne peut plus soutenir valablement que la Suisse est le lieu idéal de placement de ce type de revenus. En revanche, il ne fait nul doute que la Suisse est et reste une destination prisée en matière d’empilage voir d’intégration.

* placer – introduction d’argent sale dans les circuits financiers
*empiler – réaliser diverses opérations financières et des montages financiers complexes afin de créer une distance entre l’origine criminelle des avoirs et une utilisation ultérieure
* intégrer – placements immobiliers / financiers, acquisitions de biens de consommation (voitures, bijoux), montages commerciaux avec des capitaux blanchis à la suite d’opérations financières licites.

Le HT sert également à financer le terrorisme : ISIL, Boko Haram, Al-Shabaab y ont recours.

Et votre généraliste dans tout cela ? Dans le monde du HT pour commerce d’organes, cela n’est dépourvu de logique de considérer un néphrologue dans une région sujette au trafic (qui n’est pas forcément un pays considéré à risque) comme un client à risque accru ou exerçant une activité sensible.

En conclusion, force est de constater que les criminels ont des trains d’avance en la matière, nous captons aujourd’hui, selon les Nations Unies, qu’environ 1% de l’argent blanchi avec nos mesures actuelles de lutte contre le blanchiment d’argent et de financement du terrorisme. La manière de s’y prendre à la « tick the box » se révèle vexatoire et fastidieuse. Mais faute d’avoir la solution miracle, en contribuant par une application sérieuse et réfléchie aux mesures de diligence LBA, on contribue à un dessein bien plus global, celui de mettre des bâtons dans les roues à l’essor de la criminalité mondiale.

Bonne lecture !